Flauraud : Les syndicats dénoncent, Olivier Guillaume répond

Caroline Ridet
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Fin 2019, Olivier Guillaume prenait la direction générale de l’entreprise auvergnate, propriété du groupe Emil Frey. Sa mission : mener une vaste restructuration de l’entreprise pour lui assurer un destin…national. (Aurilis Group/Flauraud rationalise ses appros... et le reste)

En janvier 2021 était présenté aux 467 salariés et au CSE (comité social et économique) le plan de sauvegarde de l’emploi (PSE). Les négociations avec les représentants syndicaux ont démarré en février. (Olivier Guillaume, « Sans transformation, pas de vision nationale pour Flauraud )

À la veille de la clôture des trois mois de négociations, entre volonté de transformation de la direction et espoir de se limiter à une évolution des représentants des salariés, des divergences demeurent. Le 5 mai, les jeux seront faits ! Selon l’issue de ces échanges, il y aura soit un accord avec les syndicats, soit un document unilatéral de l’employeur, qui sera regardé de près par la DIRECCTE courant mai.

Zepros confronte les points de vue avec l’interview de deux représentants syndicaux de Flauraud et la réponse de son directeur général.

INTERSYNDICALE : « Ce PSE n’a rien d’économique, c’est une restructuration qui s’oriente vers un outil logistique »

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Jean-Luc Chiron (secrétaire du CSE, représentant la CFE-CGC) et Rémi Veyssière (délégué CGT) font le point à mi-parcours.

Où en sont les négociations ?

Jean-Luc Chiron et Rémi Veyssière : Au début, notre direction et le groupe Emil Frey voulaient aller très vite et nous imposer leur plan à l'échéance du 24 février au bout de six réunions, alors que la loi encadre la procédure du PSE d'un délai de trois mois. La réalité, c’est que 112 suppressions de poste sont annoncées. Dans son projet, la direction souhaite fermer six magasins dont certains historiques situés dans des zones rurales économiquement faibles. La direction envisage de supprimer des ateliers techniques que des collaborateurs seraient prêts à reprendre.

Assiste-t-on à un changement radical par rapport au modèle ?

J.-L. C. et R.V. : Depuis deux mois, nous travaillons sur les critères de départ, mais nous aimerions discuter de l’avenir de l’ensemble des salariés, être écouté sur des propositions alternatives. La direction pourrait s’inspirer de modèles existants chez certains concurrents (plateformes logistiques + relais). Une plateforme livrerait en H+4 deux fois par jour dans sa zone de chalandise et en H+24 ou H+48 au national pour le matériel le plus coûteux et volumineux. S’appuyant sur les agences relais, des magasins avec le 20/80 livreraient deux à trois fois par jour le dernier kilomètre. Le catalogue Mecasystems est également un outil essentiel de ce dispositif, ainsi que le réseau Club Auto Conseil. Actuellement, la direction, fermée à toutes nos propositions, veut nous transformer en logisticien au détriment de la présence commerciale.

Comment réagissent les clients et les collaborateurs ?

J.-L. C. et R.V. : Le mécontentement se manifeste déjà de la part de clients qui se sentent délaissés et partent vers la concurrence. Les salariés ne comprennent pas et la colère monte. Depuis le rachat en 2017, le groupe Emil Frey n’a pas compris notre entreprise et la typologie de nos clients. Pendant le premier confinement, nous avons fermé le 17 mars sans prévenir les clients. Puis notre direction a réagi après les autres en rouvrant progressivement les magasins à partir du 20 avril et en proposant le click & collect. En 2020, le groupe a sous-performé par rapport aux chiffres des adhérents de la FEDA.

Croyez-vous à la conquête du marché national ?

J.-L. C. et R.V. : Nous y croyons car, d’après les médias, le groupe Emile Frey est financièrement solide. Mais depuis 2017, il manifeste une vision globale et une stratégie très calquée sur celle des constructeurs qui ne prend pas en compte les réalités du terrain et la vision locale. Le groupe ne mesure pas la puissance de la proximité qui était notre force. Contrairement à nous, certains concurrents renforcent leurs magasins dans les villes moyennes. Nous pensons que cette stratégie, pouvant s’envisager dans les grandes métropoles, ne peut pas s’appliquer à nous.

Jean-Pierre Raynault

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Olivier Guillaume, DG de Flauraud : « Signer un accord avec les salariés est notre priorité »

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Suite à la communication de l’intersyndicale, Olivier Guillaume a accepté de répondre.

Une transformation indispensable

Olivier Guillaume : Notre plan n’est pas de casser l’existant, mais de nous appuyer sur nos bases régionales pour un développement national. Notre organisation ne répond plus aux besoins de nos clients et n’est pas économiquement viable à terme. Le marché évolue à une vitesse incroyable, les demandes des clients aussi et face à nous nos concurrents grossissent. Si nous-mêmes ne participons pas à ce mouvement de transformation, nous disparaîtrons.

Négociations tendues

O. G. : Nous avons respecté la période de consultation des trois mois. Le CSE va se prononcer le 5 mai sur le plan. Notre volonté est vraiment de trouver un accord. Le plan se mettra en place au cours du second semestre. Nous sommes conscients que cette période de transformation est douloureuse pour tout le monde. Cela nécessite de l’explication, d’où des communications très régulières avec l’ensemble des salariés. Certains attendent d’ailleurs que le plan se déroule, car ils sont conscients que l’entreprise ne pouvait pas continuer à avancer ainsi. Nous n’avons botté en touche aucune des propositions faites par les délégués syndicaux. Le plan que nous proposons est ciselé pour Flauraud et en aucun cas une copie de ce qui existe chez d’autres. C’est du sur-mesure.

Fermetures et suppression de postes

O.G. : Il ne s’agit pas de six fermetures. Le magasin de Clermont-Ferrand, installé à 450 mètres de la plateforme, va y être intégré. Ensuite, six magasins fusionnent (*). C’est de l’optimisation car les coûts de structure sont devenus trop élevés. Et puis aujourd’hui ce n’est plus le client qui vient au magasin mais le magasin qui livre au client. De même, 112 suppressions de poste est un maximum. Mais il ne faut pas oublier les 47 créations de poste prévues dans le plan, dont certains seront proposés à des collaborateurs du groupe.

(*) Lyon-Décines, Périgueux sera regroupé avec Brive, Castres avec Albi et Millau avec Rodez.

Passer de distributeur à logisticien

O. G. : Sur les dix dernières années, ce qui a le plus évolué dans la distribution, ce sont les attentes des clients principalement basées sur la fiabilité, la rapidité de la logistique. Le modèle n’impactera pas notre force de vente et la proximité avec les clients. Les livraisons se feront du magasin et de la plateforme qui va donner accès à un stock vingt fois supérieur à celui d’un magasin local. Cela veut dire une meilleure disponibilité des produits. La logistique devient la clé d’entrée, mais Flauraud fera toujours de la distribution.

La mutation de Flauraud calquée sur une stratégie constructeur

O.G. : La vision du groupe n’est pas de dupliquer le fonctionnement d’une concession à la distribution de pièces. Ce n’est pas le groupe Emil Frey qui a construit le plan, mais la direction de Flauraud associée au comité de direction, donc des gens depuis longtemps dans l’entreprise qui connaissent parfaitement les spécificités du métier et de l’entreprise. Après, lorsque des activités sont arrêtées ou ralenties, c’est aussi parce que nous avons une lecture de profitabilité et qu’elles pénalisent l’ensemble de l’entreprise.

Caroline Ridet

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