Données publiques : 60% des administrations en retard

Philippe Pottiée-Sperry
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A l’heure où le gouvernement déploie sa feuille de route sur l'ouverture et l'exploitation de la donnée, la société de conseil Invenis a réalisé une étude sur la perception des agents publics vis-à-vis de l’usage de la data au sein de leur administration (1).

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Parmi les principaux constats : 60% des administrations s’estiment en retard en matière de données et 40% pointent un manque de compétences. De même, près de 70% des répondants affirment que la circulaire du Premier ministre du 27 avril 2021 relative à la politique publique de la donnée () n’a eu aucun impact immédiat (49% pour ceux des administrations centrales et 75% de ceux des administrations locales).

Leçons de la crise sanitaire

« La crise sanitaire a démontré que la donnée est un outil majeur d'aide à la prise de décision, souligne l’étude, car on comprend et pilote bien uniquement ce que l’on peut mesurer ». 52% des répondants estiment que la crise a accéléré les projets de traitement de la donnée au sein des administrations, tandis que 48% jugent qu’elle les a retardés ou stoppés. Au niveau national, l’analyse des données a été l’une des clés de la gestion de la pandémie. Chiffres de contaminations, taux d’occupation des lits d’hôpitaux, statistiques des décès… ont été autant d’indicateurs scrutés chaque jour par les autorités et d’outils de pilotage des actions publiques.

Manque de compétences et d’outils

Pour 54% des personnes interrogées, le manque de compétences et d’outils est le principal frein dans le traitement des données publiques. Sont également pointés le volume grandissant des données à traiter (16% des réponses), la difficulté à définir un usage précis de l’exploitation des données (15%) ou l’inadaptation des organisations/infrastructures (15%). L’étude souligne que les administrations rencontrent des difficultés à répondre aux nouvelles contraintes posées par le traitement de la donnée, à l’instar de nombreuses entreprises privées. Le principal écueil tient au manque d’expertise au sein des administrations, mais aussi, plus largement, à leur trop faible « culture data ». « La mise en place d’une véritable stratégie publique, ainsi qu’un travail d’organisation et d’acculturation à la data au sein des administrations sont donc indispensables, afin non seulement de traiter et valoriser correctement la donnée, mais aussi de répondre aux évolutions qu’elle connaitra dans le futur », estime l’étude.

Améliorer les politiques publiques

58% des répondants (64% dans les administrations locales) disent analyser leurs données en vue d’améliorer les politiques publiques. Arrivent bien plus loin la volonté d’innovation dans les administrations (24%) et de transparence avec les citoyens (18%). L’amélioration des politiques publiques est un des grands enjeux du plan d’accélération de la transformation numérique de l’État et des territoires, et plus spécifiquement de la nouvelle stratégie data voulue par le gouvernement. « [La donnée vise à] produire un meilleur service public, transformer en profondeur, piloter par les résultats », a ainsi déclaré Amélie de Montchalin, Ministre de la Transformation et de la Fonction publiques.

Se réorganiser pour valoriser la data

Pour 67% des répondants, l’amélioration de l’organisation interne des administrations est le grand enjeu des douze prochains mois en matière de valorisation des données. Au sein des administrations locales, ce chiffre passe à 74%. Dans le détail, cela concerne les infrastructures SI de chaque administration, la gouvernance de la donnée, la préparation, le nettoyage et l’analyse des données… Arrivent plus loin dans les priorités, l’investissement (18% des répondants) et l’adoption de nouvelles technologies telles que l’intelligence artificielle et le Big Data (15%).

Manque de maturité pour l’analyse des données

Très majoritairement, les administrations ne se considèrent pas suffisamment mûres dans le domaine de l’analyse des données. Ainsi pas moins de 93% se jugent peu/pas matures (58%) ou seulement en phase de maturité (35%). Avec une grande diffèrence entre administrations centrales (63% se pensent matures) et locales (26%). Autrement dit, les trois quarts des administrations locales se jugent en retard pour l’usage de la donnée. « La transformation numérique souhaitée par le gouvernement paraît avoir du mal à se concrétiser aux échelons locaux. Manque de moyens ? de temps ? de compétences ? » s’interroge l’étude.

Le besoin d’un pôle d’expertise data

Pour satisfaire à la feuille de route fixée par la circulaire Castex, et plus globalement aux problématiques de la donnée qui touchent l’ensemble du secteur public, seuls 37% des répondants estiment pouvoir compter sur un pôle d’expertise data au sein de leur équipe. 57% reconnaissent ne disposer d’aucun pôle, qu’il soit interne ou externe. Une fois encore, les disparités entre administrations centrales et locales sont fortes : 53% des premières indiquent ne pas bénéficier d’un pôle d’expert contre 69% pour les secondes. « Ces chiffres interpellent et montrent que les administrations vont devoir s’équiper et s’entourer d’équipes compétentes si elles veulent répondre aux grands défis liés à la data », conclut l’étude.

P.P.-S.

(1) L’étude, menée par mail entre le 6 et le 30 septembre 2021, repose sur un échantillon qualifié de 178 décideurs publics. 46% des répondants appartiennent à une administration locale, 33% à une administration centrale et 21% à des établissements publics (secteurs hospitaliers, fondation d’utilité publique, etc.).

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Philippe Pottiée-Sperry
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