« Nous sommes en capacité de reprendre le travail dans 1 ou 2 semaines », Y. Ainouche (p-dg Ex’Im)

Marie Laure Barriera
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Arrêt des chantiers et confinement des clients, mesures pour anticiper la reprise et scénario catastrophe, évolution de la prévention et des modes de travail… Le président-directeur général d’Ex’Im, société spécialisée dans le diagnostic immobilier et le repérage d’amiante, évoque tous les sujets. Yannick Ainouche se dit prêt à reprendre le travail dès le mois d’avril, à condition que les collaborateurs soient correctement équipés et protégés.

Zepros : Comment se passe l’activité de votre entreprise en cette période de confinement ?Yannick Ainouche : Nos 105 agences sur le territoire sont à l’arrêt. Environ 90 % de nos clients le sont aussi, puisqu’il n’y a plus de mise en location nécessitant un diagnostic immobilier, ni de chantiers de rénovation possibles. La totalité de nos techniciens sont donc en chômage partiel. D’autre part, depuis l’arrêt du 16 mars 2020, nous avons fait don de tous nos équipements de protection individuelle (EPI) comme les combinaisons et les masques FFP3 que nous utilisons (encore plus complets que les FFP2) aux personnels de santé. Nos salariés ne sont donc plus protégés en ce qui concerne le risque amiante. Enfin, nos collaborateurs ont une réticence à intervenir chez les gens pour faire du diagnostic.

Zepros : D’autres activités peuvent-elles tout de même être menées ?
Y.A. : Pour nos techniciens à l’arrêt, ils ont tout d’abord finalisé tous les rapports qui étaient à faire. Ils ont ainsi épongé les éventuels retards. Puis nous avons mis en œuvre un plan de formation et de montée en compétence grâce à la diffusion de documents et à de l’enseignement à distance. Au point de vue fédéral, nous travaillons avec tous les confrères de notre filière à des modes opératoires de reprise d’activité pour contrôler le risque Covid-19. Il s’agira d’appliquer scrupuleusement les gestes barrières, de désinfecter le matériel, tout cela pour protéger nos collaborateurs et nos clients. Nous souhaitons mettre au point une décharge qui serait signée pour permettre aux techniciens d’intervenir à domicile, comme le font l’OPPBTP et la FFB pour les artisans et petites entreprises. Car nous sommes dans le même secteur, en intervenant avant les ventes et avant les chantiers. C’est un sujet important pour dégager les responsabilités.

Zepros : En quoi cette pandémie de coronavirus va-t-elle changer les habitudes et façons de faire ?
Y.A. : La prévention des risques va encore être accrue sur les chantiers. Cela affectera les relations sociales, et cela va compliquer les choses avec des étapes supplémentaires de nettoyage du matériel. Autre problème, un technicien sur un chantier ne peut pas être isolé, pour éviter les accidents et prévenir les blessures. Or, il ne doit pas non plus y avoir d’interactions entre les personnes… Nous devrons donc mobiliser deux techniciens, ou en faire accompagner par un responsable SPS, toujours sans interaction. Cela peut vouloir dire deux véhicules différents aussi. Bref, ce sera plus compliqué logistiquement et plus coûteux.
Mais cette période nous remet aussi en question de façon positive. Le monde du BTP allait peut-être trop vite ? La pause forcée fait du bien psychologiquement.

Zepros : Comment envisagez-vous la sortie de crise ?
Y.A. : Sur l’immobilier malheureusement, les ventes seront en diminution, car le cash sera tourné en priorité vers les entreprises. Puis les particuliers auront des incertitudes concernant leur situation salariale avec une possible baisse du pouvoir d’achat voire un risque sur l’existence même de l’entreprise. Je veux d’ailleurs attirer l’attention sur le fait que certains dirigeants d’entreprise sont eux-mêmes gravement malades et que cela peut mettre à mal la survie de leurs sociétés. Certains n’ont pas eu le temps de mettre en place des procurations pour verser les salaires ou demander le chômage partiel de leurs salariés.
Sur la rénovation, la reprise va être tendue car les donneurs d’ordres – bailleurs sociaux, pouvoirs publics – doivent poursuivre leur plan de marche et risquent d’accumuler le retard. Il y a deux scénarios différents : le premier, optimiste, envisage une reprise partielle en mai-juin. Le pessimiste la voitgL en septembre. Dans ce 2e cas, les entreprises ne tiendront que si l’Etat tient ses promesses et verse bien le chômage partiel. Pour notre activité, les salaires représentent 75 % des charges d’exploitation. Il y a donc un risque monumental sur les trésoreries et de dépôts de bilan en cascade. Le gouvernement devra être au rendez-vous. De notre côté, grâce à des masques de protection respiratoire ventilés à cartouche, nous sommes en capacité de reprendre le travail dans une ou deux semaines et nous aurons de quoi répondre à une activité normale pendant quelques temps pour le BTP, mais pas pour le diagnostic immobilier. Tout l’enjeu est de ne pas prendre trop de retard, sinon ce sera la catastrophe : sans nous, il ne peut pas y avoir de ventes ni de chantiers de rénovation.

Zepros : Justement, quelles sont les mesures qui ont été prises pour vous aider et celles que vous demandez ?
Y.A. : La DHUP nous autorise à décaler nos certifications qui arrivent à échéance dans les 6 mois. Cela nous permettra de garder des techniciens opérationnels et de les envoyer plus rapidement sur les chantiers, avant même la fin du confinement tant qu’un protocole opératoire aura été mis en place. Sur l’approvisionnement des masques FFP, utiles dans le diagnostic là où les quantités de fibres sont faibles, et des autres EPI, Bercy nous a fourni un document qui nous assure de pouvoir passer des commandes auprès des fournisseurs à l’étranger, indépendamment du mécanisme national de réquisition. Pour la reprise, nous militons aussi pour un dépistage le plus tôt possible, afin de pouvoir remettre sur le terrain des collaborateurs sains et rassurés. Mais ce seront bien entendu les pouvoirs publics qui décideront de l’affectation des tests.
Propos recueillis par Grégoire Noble

Marie Laure Barriera
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